Le 24 janvier, le Comité d’action et de défense des droits nous conviait à une soirée citoyenne pour partager, s’informer et mieux comprendre les politiques du gouvernement fédéral et leurs impacts sur nos vies et notre environnement. Plus de 35 personnes ont pris part à ce rendez-vous qui s’est révélé très instructif et mobilisant!
Quatre invités nous ont présenté leurs analyses des politiques du gouvernement de Stephen Harper, démontrant quelles sont les atteintes à notre démocratie canadienne (et québécoise par ricochet).
Brisant la glace, la député néo-démocrate de Laurier—Ste-Marie, Mme Hélène Laverdière, nous fait part de son expérience au parlement d’Ottawa. Elle a souligné avec indignation le fonctionnement anti-démocratique installé à la Chambre des Communes avec les Conservateurs qui, nous a-t-elle rappelé, n’ont recueilli que 39% des voix aux dernières élections alors que 61% des électeurs ont choisi d’autres partis.
Avec ce gouvernement « majoritaire », on a jusqu’ici eu droit à des lois fourre-tout (ou « omnibus »), des suspensions de sessions de travail au Parlement, 41 baillons empêchant tout débat, le musellement et de l’instrumentalisation de la fonction publique et le contrôle de l’information. Des orientations idéologiques ont été données à l’Agence de Coopération et de Développement International (ACDI), en mettant fin, par exemple, au soutien des organismes d’aide aux femmes qui appuient des interventions sécuritaires d’avortement. Ce gouvernement a démantelé l’organisme Droits et Démocratie qui intervenait pour le respect des droits humains dans des pays en développement. Il a fermé la biosphère et a mis fin à une table ronde sur l’environnement. Les exemples ne manquent pas.
Pour mieux saisir la pensée des conservateurs, Julie Maude-Beauchesne, du Réseau Québécois pour l’Action Communautaire Autonome (RQ-ACA), a décortiqué pour nous les valeurs et la philosophie qui animent les courants du conservatisme traditionnel et du néo-conservatisme, où se situerait davantage Stephen Harper. Ainsi, pour les néo-conservateurs, il y aurait trois éléments indispensables. D’abord la moralité, i.e. l’ordre établi par l’état, la fin de la paresse (ce qui expliquerait les modifications sévères à l’assurance-emploi). Ensuite, la discipline rigide, qui oriente la politique internationale (pensons à la suspension de l’aide canadienne à Haïti dont le « progrès limité» dans la reconstruction a été évoqué par le Ministre Julian Fantino). Enfin, le patriotisme, qui utilise la notion du bien et du mal, dont on se sert pour modeler l’intervention internationale.
Après avoir mieux saisi ce qui guide la pensée néo-conservatrice, c’était au tour de Patrick Rondeau, conseiller régional pour la Fédération des Travailleurs du Québec (FTQ), de nous entretenir sur les nombreuse coupures dans des services aux citoyens et les organismes de défense de droits et d’intervention internationale comme Alternatives ou Kairos. Depuis que Stephen Harper dirige le Canada, son gouvernement a augmenté de 42% l’aide accordée aux organismes d’aide internationale qui ont une orientation religieuse. En revanche, il coupe l’aide aux organismes environnementaux, en les accusant de terrorisme, et plusieurs scientifiques déplorent les coupes drastiques dans les programme de recherche, notamment au programme spatial. Le gouvernement a attaqué le droit de négociation pour les employés des Postes, d’Air Canada, etc. Il vient de voter une loi pour que les syndicats rendent compte de leur budget de fonctionnement à la population, alors qu’ils ne sont redevables qu’à leur membres. Ajoutons à cela le resserrement de la loi sur l’Immigration et le contrôle de la presse parlementaire: la liste des politiques néfastes s’allonge de plus belle
Les autochtones du Canada en savent aussi quelque chose. David Sioui, membre de la nation Wendat et rédacteur en chef de la revue « La griffe du Carcajou », nous a conscientisé sur les effets pervers des lois votées, par exemple sur la Protection des eaux navigables qui touche directement les droits des autochtones sur leur territoire, ou encore la loi sur la transparence financière des Premières nations qui signifie pour les Premières Nations une ingérence totale du gouvernement fédéral. L’absence de consultation du gouvernement avec les premières nations semble être de plus en plus la règle au fédéral, nous a rappelé M. Sioui qui souligne l’importance pour les nations autochtones de la démocratie participative et du respect des traditions.
Suite à ces exposés enrichissants, ce fut au tour des participantes et des participants d’exprimer leurs commentaires, questions et opinions. Ils n’ont pas manqué de souligner le caractère dictatorial du gouvernement fédéral en refusant tout débat parlementaire, s’indignant aussi des attaques contre le droit à l’avortement, contre les syndicats, contre la non protection des canadiens condamnés à des peines de mort dans d’autres pays. Ils ont aussi fait référence aux entreprises minières canadiennes qui se moquent de l’environnement et des droits des populations dans d’autres pays, comme au Guatemala et en Afrique, tout en déplorant l’appui inconditionnel du Canada à Israël.
Il ne faut pas oublier que plusieurs québécois et canadiens s’activent déjà. Il existe plusieurs initiatives de solidarité, des actions collectives, des regroupements de syndicats, d’organismes communautaires, d’environnementalistes, de féministes, des mouvements proactifs, comme celui de Idle No More (« Finie l’inertie») des peuples autochtones. Partout au pays, des citoyens ont manifesté contre les attaques à l’assurance-emploi; des pétitions circulent, des gens élèvent la voix contre l’Accord commercial et économique avec l’Union Européenne qui menace la souveraineté des peuples, des coalitions comme « Pas de Démocratie Sans Voix » veillent au grain…
Au discours néo-conservateur et néo-libéral, opposons donc un discours de solidarité, de justice sociale, de respect des droits et de démocratie, chez nous comme ailleurs. Et continuons de prendre la parole !
*À noter que la prochaine activité du Comité d’Action et de Défense des Droits de la Maison d’Aurore aura lieu le 15 mai prochain. Elle portera sur la démocratie et le mode de scrutin : Une soirée qui risque d’être fort pertinente dans cette année électorale (au municipal et qui sait, peut-être au provincial) !
Un texte d’Hélène Langlois, membre et collaboratrice au Comité d’action et de Défense des Droits (CADD)