Le racisme systémique, c’est quoi ?

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De retour de ma promenade solitaire, en ce temps de pandémie, je m’attelle à cet article sur le racisme systémique. Il nous arrive de nous demander : suis-je raciste? Question gênante. On espère ne pas l’être ou pas trop. Mais qu’en est-il du racisme systémique? D’où vient-il?

Le 24 février 2020, quand il était encore possible de se rassembler, la Maison d’Aurore a invité Alexandra Pierre pour nous expliquer le racisme systémique et discuter avec les participants. Alexandra est vice-présidente de Relais Femme et militante depuis dix ans à la Ligue des droits et libertés.

De quoi s’agit-il?

Tout d’abord, le racisme n’est pas une réalité biologique, mais une réalité sociale. Il n’existe qu’une seule race humaine. À la différence de la xénophobie, la peur de l’autre qui a toujours existé et existera toujours, le racisme est lié à l’histoire. La notion de race est apparue au XIXe siècle avec la colonisation. Trois faits se sont produits à cette époque : la traite des esclaves, (le commerce triangulaire (des bateaux partaient d’Europe avec des marchandises, se rendaient sur les côtes d’Afrique pour échanger des biens contre des personnes. Les marchands européens les vendaient comme esclaves en Amérique du Nord et du Sud et dans les Antilles, puis retournaient en Europe), l’esclavage (main-d’oeuvre appartenant à un propriétaire). De cette situation historique est née la différenciation, l’exclusion et l’humiliation des personnes de couleur.

Qu’en est-il au Québec?

De 1638 à 1724, le Québec a connu l’esclavage des autochtones (2/3) et des noirs (1/3) principalement dans les régions de Trois-Rivières, Québec et Montréal. Les femmes travaillaient comme domestiques et les hommes comme agriculteurs ou artisans. Plus tard, d’autres catégories de personnes, sans être esclaves, ont connu des conditions de travail très pénibles : les Chinois qui ont construit les lignes du chemin de fer canadien, les Noirs des Caraïbes qui travaillaient comme bagagistes dans les gares, par exemple.

Aujourd’hui comment définit-on une personne racisée?

C’est une personne qui subit un processus de racisme, sur une base réelle ou supposée, en raison de sa langue, de son accent, de sa religion, de sa couleur, de son pays d’origine, etc. Cette notion de personne racisée est différente du concept de la personne immigrante, appartenant à une minorité visible ou à une communauté culturelle.

Quelles formes prend le racisme systémique ?

Le racisme est un système qui est fait de comportements individuels directs (insultes, discrimination directe, violence physique, préjugés) et indirects (des idées préconçues (biais), imaginaires, selon le bagage culturel ou l’origine sociale de chacun) et qui relève de l’organisation sociale (c’est le racisme systémique). Par exemple, selon la catégorisation sociale que l’on projette sur une personne, cette dernière n’aura pas les mêmes chances d’obtenir un emploi. On explique le racisme dans les institutions par le phénomène de la roue : un comportement individuel influe sur l’organisation qui, à son tour influe sur l’individu. Ainsi, le profilage racial a un fondement historique. Dès leur arrivée, les esclaves n’avaient pas le droit de circuler dans les espaces publics, de là est née la crainte de voir quelques hommes noirs ensemble. La façon dont on conçoit la réalité sociale influence l’interprétation du phénomène social.

Comment, à cause des idées préconçues racistes, se perpétuent les inégalités?

D’après Alexandra Pierre, les inégalités sociales ne sont pas causées par des problèmes de communication, d’intégration, de manque de connaissance ou de valorisation de la diversité. La distribution inégale du pouvoir entraîne l’inégalité raciale, l’accès, de façon différente, aux droits à la santé, l’éducation, la liberté d’expression, etc. Les associations d’idées sont implicites, conscientes ou inconscientes. Donnons un exemple : le syndrome méditerranéen. On dit que les personnes venant du pourtour de la Méditerranée exagèrent leur douleur. Cela peut entraîner des différences de traitement, d’accès à des soins. Autre exemple : l’archétype de la femme noire : fâchée, agressive, rebelle, mais aussi douce, maternelle, mais aussi sensuelle, lascive.

Quel lien y a-t-il entre le racisme et d’autres discriminations systémiques?

Le racisme n’évolue pas seul. S’y ajoutent le sexisme, la situation de handicap, l’âgisme, l’orientation sexuelle, la santé mentale…

Que pouvons-nous faire?

Sachant qu’il est difficile de nommer le racisme systémique dans notre société d’une part et que d’autre part, les personnes racisées en viennent parfois à douter de ce qu’elles vivent, comment devenir tous et toutes des alliéEs?

• Nommer et reconnaître l’existence du racisme systémique. Agir et prendre conscience de nos idées préconçues et de nos préjugés

.• Être à l’écoute et faire comprendre. Donner la parole aux personnes racisées, amplifier leur voix, ne pas parler à leur place.

• Être solidaires des personnes racisées, appuyer la lutte des groupes antiracistes.

• Surveiller les politiques publiques pour s’assurer qu’elles n’excluent pas les personnes racisées.

Je vous souhaite une bonne réflexion sur ce thème et vous invite à venir discuter avec nous sur d’autres thèmes que je vous incite à nous suggérer. Prenons tous et toutes soin de nous et des autres dans un esprit d’ouverture et d’équité.

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